Gate7 a rencontré Emmanuel Combe Economiste, professeur des Universités à Skema Business School pour faire un point sur les transformations du transport aérien liées à la COVID-19
Gate7 :Le transport est aérien frappé de plein fouet par la crise sanitaire et la reprise n’est pas pour demain semble t’il. Votre analyse est que les compagnies ultra low-cost sortiront gagnantes de cette crise. Comment l’expliquez vous ?
Emmanuel Combe :Il faut en effet distinguer les compagnies ultra low-cost telles que Ryanair et Wizzair des compagnies middle-cost comme Easyjet.
Les ultra low-cost ont été assez peu affectées par la crise actuelle qu’elles ont abordées en étant très rentables, avec beaucoup de cash et un modèle qui leur a permis de s’adapter très rapidement et de réduire leur couts fixes.
La reprise qui s’annonce très progressive se fera avant tout avec une clientèle touristique et affinitaire qui est leur cœur de clientèle.
Face à elles, on trouve les compagnies nationales comme Air France et Lufthansa qui ont bénéficié d’aides par les pouvoirs publics et Easyjet qui est une compagnie middle-cost. Easyjet est en concurrence directe avec AF et LH et sa clientèle est en partie une clientèle d’affaires. Elle risque d’être une victime collatérale de cette crise.
Je ne serais pas étonné que Ryanair saisisse cette opportunité pour aller sur les plates-bandes d’Easyjet ou investisse le marché nord européen ou Norwegian est en difficulté.
Gate7 :Le low-cost long courrier semble en revanche un échec (arrêt de Norwegian, difficultés de Level et Air Asia).
Emmanuel Combe :Je n’ai jamais cru qu’il y avait un marché low cost long courrier suffisant. Presque toutes les tentatives en la matière se sont soldées par un échec. Il n’est pas possible de dupliquer le modèle low-cost moyen-courrier sur le long courrier car ce sont deux métiers différents. Le moyen-courrier est une commodité tandis que le long courrier reste une expérience client.
Il y a toutefois une exception à la règle avec French-Bee qui s’en sort bien même si c’est à une échelle réduite et sur un marché spécifique. Gate7 :Y a-t-il encore une place pour les compagnies legacy telles qu’Air France sur le moyen-courrier en Europe ?
Emmanuel Combe :Le groupe Air-France a sur le court et moyen-courrier deux atouts importants : Transavia dont l’image est positive et elle détient la majorité des slots à Orly.
Si elle veut résister sur le court et moyen-courrier et être rentable Air France doit à mon avis rapidement transférer toutes les lignes radiales au départ d’Orly à Transavia dont les couts opérationnels lui permettent d’être compétitive. Dans ce marché qui est en train de basculer avec la crise la vitesse d’exécution sera capitale.
On peut imaginer qu’Air France conserve l’alimentation du hub de CDG avec ses appareils et sa marque et que les lignes qui nécessitent moins de fréquences et capacité soient opérées par des compagnies partenaires comme Amelia ou une Hop plus petite qu’aujourd’hui.
Gate7 :Beaucoup de compagnies nationales européennes, telles Alitalia, Brussels Airlines ou encore Air Portugal n’ont semble-t-il pas une taille suffisante pour prospérer. Quel est leur avenir ?
Emmanuel Combe :Je pense qu’il y aura inévitablement des restructurations et des consolidations dans le paysage aérien européen. Beaucoup de compagnies font face à un scenario à la Alitalia, c’est à dire à une attrition progressive avec une réduction de leur flotte et de leur réseau. Les compagnies comme Wizzair qui s’est récemment énormément développée et Ryanair reprendront progressivement une partie de leurs liaisons domestiques et moyen-courrier comme cela s’est fait en Italie.
Retrouvez l'étude Fondapol en français et en anglais : http://www.fondapol.org/etude/apres-le-covid-19-le-transport-aerien-en-europe-le-temps-de-la-decision/
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