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Dans quelles conditions Air France et ses consoeurs pourront-elles être sauvées?

Dernière mise à jour : 25 juil. 2020

Paris le 3 juillet 2020 - Retrouvez sur Gate7 l'article publié par Olivier Joffet dans le Huffington Post de ce jour.


Privées de revenus, les compagnies sont condamnées à gagner en productivité et subissent un sureffectif généré par la baisse d’activité.


Par une intervention rapide et massive des États, les plus grandes et les plus importantes compagnies aériennes économiquement parlant ont obtenu un répit bienvenu, repoussant une vague de faillites attendue.

Toutefois, Air France et ses consœurs font désormais face à un défi majeur.

Auront-elles les moyens de rembourser une dette enflant dans des proportions inédites, selon les termes et calendriers définis, dans une période où la demande reste minime et où les trésoreries s’évaporent toujours à des vitesses stupéfiantes?


Un environnement difficile

Dans ce contexte récent de reprise, la situation sanitaire n’est pas maîtrisée en tous points du globe et de nombreux États ne rouvriront pas leurs frontières immédiatement.

Décimée par la paralysie quasi totale du trafic aérien depuis mars, la demande reste frileuse, repoussant les perspectives d’un redressement rapide et condamnant les compagnies à évoluer dans un marché surcapacitaire. Une stimulation de la reprise via une baisse tarifaire devient obligatoire tant le prix reste le moteur principal de choix des voyageurs.

Privées de revenus, les compagnies sont condamnées à gagner en productivité et subissent un sureffectif généré par la baisse d’activité. De plus, une tendance au ralentissement des voyages d’affaires et du tourisme long-courrier émerge, privant les Legacies de recettes sur des segments critiques et leur imposant de contracter encore des marges déjà faibles (environ 5%, 2% pour Air France).

Ajoutons que les modèles sociaux et fiscaux alourdissent toujours un peu plus la balance.


Des prêts massifs aux contreparties complexes

Les prêts accordés à Air France-KLM répondent à un triple impératif; surmonter le choc de la crise, affronter la reprise avec une marge de manœuvre élargie et financer la restructuration de la compagnie, le tout assorti de contreparties importantes complexifiant le jeu dans un environnement explosif.

L’abandon demandé par l’État français des lignes que le train pourrait substituer en moins de 2 h 30 apporte un double renfort de pression concurrentielle; celui des low cost qui décideraient d’opérer sur ces liaisons domestiques et celui du train sur ces mêmes axes. Situation paradoxale quand l’objectif est de sauver Air France… 


Une explosion de la dette

Les 7 milliards d’aides accordées à Air France-KLM se composent d’un prêt garanti par l’État de 4 milliards d’euros sur 12 mois avec deux options d’extension d’un an consécutives (échéance au plus lointain en 2023), et un prêt d’actionnaire de 3 milliards d’euros à maturité de quatre ans (échéance 2023) aux mêmes conditions (plus lointain 2025), le tout au taux de 7%.

Selon les estimations, un retour aux volumes de trafic de 2019, et de revenues par analogie, n’interviendrait pas avant 2023, échéance de la totalité du prêt. Dans le même temps, le plan d’investissement de la compagnie (revu à la baisse) se poursuivra, honorant les engagements environnementaux souhaités par l’État via la réception d’avions neufs (A220, 350, B787), mais obligeant la compagnie à la restructuration, car les bénéfices sur la période ne suffiront pas à rembourser les intérêts de l’emprunt.


Quelles pistes?

Pour se transformer, Air France devra traiter de plan de départ, structures de coûts, restructuration du marché domestique, amaigrissement des fonctions supports… réponses à la complexité de l’équation. En complément, le groupe prévoit d’ici mai 2021 une opération de renforcement de ses fonds propres via augmentation du capital en numéraire, conversion de créances en actions ou combinaisons des deux procédés; dans le but d’améliorer un bilan dégradé par un endettement important,

Rembourser 7 milliards sous 5 ans dans ce contexte est herculéen. L’octroi du prêt d’actionnaire de l’État et l’annonce d’intention de participer au renforcement des fonds propres laissent à penser qu’il est déjà acquis qu’Air France ne sera en capacité d’intégralement rembourser ce prêt aux conditions énoncées. Il est hautement probable qu’une augmentation de capital en milliards ait lieu à moyen terme, une conversion de tout ou partie de la créance de l’État en actions semble être une voie acceptable pour les deux parties.


Quid de l’avenir?


Si l’opération se réalisait, l’attitude des autres actionnaires du groupe ― État néerlandais (14%), Delta, China Eastern (respectivement 8,3%) ― évoluera. Pour accompagner l’État français, les Néerlandais n’auront d’autre choix qu’une augmentation de capital en numéraire, ayant fait le choix de ne prêter qu’à KLM.

Si ce scénario intervenait, les participations de Delta et China Eastern seraient de facto diluées, situation peu acceptable pour ces deux partenaires, car ni Américains ni Chinois n’ont la certitude de retrouver leurs trésoreries d’ici 2023 et donc pouvoir surenchérir.

Cela pose deux questions:

  • Un divorce entre Air France et KLM pourrait-il avoir lieu en cas de brouille entre gouvernements Français et néerlandais?

  • Quel futur pour SkyTeam si Delta et/ou China Eastern décidaient de se retirer du groupe?

https://www.huffingtonpost.fr/entry/dans-quelles-conditions-air-france-et-ses-consoeurs-pourront-elles-etre-sauvees_fr_5ef60eb8c5b6ca97090ecb9a?utm_hp_ref=fr-homepage

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