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Grand format : Air Corsica

Paris le 10 septembre - Nicolas de Castries


Gate7 s’est rendu en Corse et plus précisément à l’aéroport Napoléon Bonaparte d’Ajaccio au siège de la compagnie de l’île de beauté Air Corsica. Au programme, un entretien avec le président du directoire Luc Bereni et une visite des locaux dont le CCO et le centre de maintenance.


Gate 7 : Comment s’est passé l’été chez Air Corsica ?

Luc Bereni : Pas trop mal si on considère que l’été a commencé le 1er juillet ! Evidemment on ne parle pas de l’avant saison puisqu’avec le confinement, il n’y a pas eu le trafic qu’il y a généralement pour les vacances de Pâques ou les ponts du mois de mai qui, en plus, étaient des bons ponts cette année. Sans compter que la fermeture d’Orly jusqu’au 26 juin, nous a encore plus pénalisés.

Malgré cela la compagnie a maintenu son programme à l’exception du vol sur Londres Stansted et la non ouverture du vol sur Göteborg. Tout le reste a fonctionné à l’identique.

La capacité est d’ailleurs conforme à ce que qui était prévu, les résultats sont honorables même si par rapport à l’été 2019, il manque une dizaine de points de remplissage et autant en termes de recettes.

Gate 7 : Donc la saison est sauvée ?

Luc Bereni : La saison est sauvée mais elle n’est pas non plus glorieuse sur le plan des résultats économiques. En temps normal, Air Corsica fait une grande partie de son résultat annuel sur les deux mois de juillet / août, tout comme l‘économie de la Corse liée au tourisme, mais ces bénéfices relatifs ne compenseront pas la perte. Il faut donc rester très mesurés dans notre analyse d’un prétendu succès.

Néanmoins quand on se compare à ce qui se passe dans l’aérien, nous sommes certainement ceux qui s’en sortons le mieux mais il ne faut pas pour autant faire de triomphalisme.

Gate 7 : Croyez-vous en une offre d’arrière saison ?

Luc Bereni : Pour septembre et octobre, nous appliquons le même politique que pour les mois de juillet et août. Il n’y aura pas de baisse de capacité à titre préventif, l’offre demeure identique à ce qui a été prévu avant le Covid, mais inférieure à juillet / août ce qui est normal.

Si on regarde les chiffres pour septembre c’est encourageant, alors que pour octobre c’est plus inquiétant. Mais c’est encore trop prématuré d’annuler des vols pour octobre. D’ailleurs si nous l’avions fait pour septembre nous le regretterions. Octobre correspond à la fin de la moyenne saison, mais si les conditions sanitaires ne se dégradent pas trop et que la météo est au rendez-vous, les gens viendront même au mois d’octobre et à la Toussaint.

Gate 7: Quel bilan faîtes-vous de vos deux Airbus A320neo ?

Luc Bereni : Nous en sommes extrêmement satisfaits ! Aussi bien de l’avion que des moteurs, (LEAP -1A de chez CFM International, ndlr), ils tiennent leurs promesses catalogue et c’est rare !

Les moteurs, combinés aux sharklets, permettent une baisse de consommation de kérosène pouvant atteindre 15% sur les étapes les plus longues. C’est un avion très fiable aussi bien au point de vue technique qu’opérationnel, nous avons d’ailleurs un taux de dispatch de quasiment 100%.

Sur le plan du bruit, la diminution sonore est significative, au sol et à bord, il est donc apprécié tant par les utilisateurs que les riverains. Les passagers s’en rendent compte et nous le disent.


Gate 7 : Allez-vous remplacer vos 4 Airbus A320ceo ?

Luc Bereni : Sur les 4 A320ceo que nous exploitons, nous sommes propriétaires de deux d’entre d’eux. Mais au vu du contexte économique actuel, ce n’est pas aujourd’hui que l’on va faire des bonnes affaires pour les revendre donc ce n’est pas au programme. Après, il peut y avoir des opportunités qui peuvent nous faire réfléchir à l’arrivée d’un A320neo supplémentaire, la porte n’est pas fermée. Nous restons attentifs.

Quant aux 6 ATR-72, ils sont à nous et nous les gardons ! Ils nous permettent d’assurer des vols toute l’année sur des villes comme Toulouse ou Lyon qui ne font pas partie du contrat de DSP. Mais ils sont surtout indispensables à notre réseau historique sur les lignes de « bord à bord ». Les jours de pointe, nous assurons jusqu’à 20 vols sur Marseille et 15 sur Nice.

Nous avons également une activité charter dont on parle assez peu car elle ne représente que 5% de notre activité mais bien plus en termes de marge. Nos principaux clients sont des tours operateurs, des équipes de football, des ministères, des pèlerinages à Lourdes, Enfin, dernièrement, nous avons repris les vols de Level en Autriche pour le compte d’un tour opérateur entre Calvi, Salzbourg et Vienne.

Gate 7 : Quel est l’attachement des Corses pour la compagnie ?

Luc Bereni : Air Corsica étant détenue à 70% par la Collectivité Territoriale de Corse, la compagnie appartient majoritairement aux Corses, plus qu’à ses dirigeants ou à certains autres actionnaires. Les Corses sont attachés à leur pavillon et à l’identité que la compagnie véhicule. Au-delà de l’impact économique local important, la maîtrise de l’outil aérien est primordiale pour une île. Nous détenons 50% du marché total, et il nous volons quotidiennement sur nos 4 aéroports toute l’année, même en hiver alors que la Corse ne compte que 330.000 habitants permanents.

Air Corsica, ce sont 700 salariés qui vivent et qui produisent en Corse. Nous disons souvent à nos détracteurs, qu’un siège d’avion qui emmène un touriste en Corse sur une autre compagnie, c’est très bien pour l’économie. Mais si ce même siège produit par Air Corsica, le client participera encore plus à l’économie Corse. Par sa contribution directe à nos emplois bien sûr mais aussi à tout notre environnement économique. Par exemple il consommera aussi nos produits, même si en ce moment nous n’avons pas de service à bord car tous nos achats en termes de presse et de restauration sont faits en Corse. Les Corses en sont conscients et tout ça fait l’attachement des Corses à la compagnie.

Le changement de marque a aussi contribué à cette appropriation. Le nom Air Corsica a plus de sens que CCM (Compagnie Corse Méditerranée) et permet plus de visibilité. C’est aussi un atout pour pénétrer les marchés étrangers d’avoir le nom de sa destination dans sa marque tout comme Air Malta ou Croatia Airlines qui sont des compagnies de niche comme nous.


Gate 7 : Comment gérer vous la maintenance de vos appareils ?

Luc Bereni : Nous avons depuis la création de la compagnie, un centre de maintenance qui est agrée PART 145.

Nous effectuons nous mêmes toutes nos checks A qui intervient environ tous les mois ou toutes les 500 heures de vol. Elle est effectuée généralement en une nuit dans l’enceinte de l'aéroport.

Et nous avons la capacité d’effectuer les checks C qui se fait environ tous les 12-18 mois ou en fonction d’un nombre précis d'heures de vol effectives défini par le constructeur. Ce que nous faisons régulièrement pour nos ATR, ce que nous pouvons aussi faire pour nos Airbus mais avec les coûts d’accordéon en d’effectifs que cela représente, nous ne faisons pas systémiquement les checks C de nos Airbus dans notre centre.


Les checks les plus lourdes sont celles de 6 ans et 12 ans qui demandent une immobilisation de plusieurs semaines, mais la saisonnalité nous arrange bien puisque nos avions ne volent pas à 100% toute l’année.

Nous avons beaucoup de stocks de pièces détachées même si nous faisons partie du pool d’Air France pour les A320, nous avons nos stocks notamment pour nos ATR ce qui nous permet d’être autonomes également dans les AOG (envoi de pièces de maintenance pour des avions au sol – aircraft on ground).

C’est un savoir faire, de la main d’œuvre locale, la plupart des cadres du technique aujourd’hui sont les apprentis d’y il y a trente ans qui ont été formés et qui ont grandi avec la compagnie. Donc c’est une fierté pour nous. Nous pourrions vendre de la maintenance, c’est un sujet qui revient régulièrement, nous ne le faisons pas aujourd’hui mais nous aurions la capacité de nous positionner comme MRO sur certains marchés, ça viendra peut-être un jour mais pour l’instant l’important c’est de mettre ce centre de maintenance au service d’Air Corsica.


Gate 7 : Comment voyez-vous la situation post covid ?

Economiquement c’est un challenge qui va nous animer plusieurs années. Socialement c’est une responsabilité de maintenir l’emploi corse. Nous sommes en train de tirer les enseignements de cette période et du télétravail pour mettre en place une organisation plus moderne. Dans l’aérien d’aujourd’hui, c’est déjà pas mal de se contenter de ce que l’on a en terme de volume et de ne pas être en train de revoir son périmètre à la baisse alors que la plupart des compagnies sont dans ce cas, mais pas Air Corsica.

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